Chroniques (presque) vertes en terre (à demi) hospitalière, épisode 68

Hi, 


Au milieu de la forêt, mais protégée de la pluie, et devant un ordi : on n'arrrête pas le progrès! Même, devant un bon café. De quoi se plaint-on? Mais de rien, la vie c'est bon, bon!

"Au milieu de la forêt... Mais elle ne devait pas aller à Sydney? Pfiouu, je ne comprends rien, moi." Je vous entends d'ici. Sydney, si si, vous avez bien compris, "Mais Sydney c'est la forêt, c'est pas urbanisé?!", mais attendez je vous dis, paniquez pas, je vais vous expliquer.

Reprenons donc, sans se précipiter. Là où on en était : dimanche, à Canberra. Après que Steven m'ait répondu "Oui" pour le Workaway, et que j'ai dit à mon patron "Au revoir, merci".


Début d'après-midi, Marc vient me chercher (merci les réseaux sociaux, car le covoiturage, en théorie... ça n'existe pas ici. Je veux dire : blablacar, tout ça, ils n'ont pas. Mais moi je veux ça... Et si je veux, j'ai : NA!), et me voilà partie. Chargée comme je ne l'ai jamais été depuis le début du journey (attention, faux ami!, ça veut dire voyage en anglais). Bah oui, parce que j'avais quand même prévu de passer 6 mois ici- donc commencé à "m'installer". Et puis.. Y'a eu le BookFair, aussi. À lui tout seul, un sac supplémentaire, merci!

BREF, je m'égare, je m'égare. Donc : on part. 3H, de Canberra à Sydney. Près de 300km et... Rien sur les côtés. Je veux dire : du désert, des champs, des montagnes, ce que tu veux, mais pas une cité. C'est une chose qu'on a du mal à concevoir. Rouler pendant 3h comme au milieu de nulle part. Alors qu'on n'est pas au milieu de la pampa, là où on s'aventure comme dans une "expé". Non, juste sur une des côtes les plus fréquentées, entre Canberra & Sydney. Et y'a RIEN?! "Mais si, y'a des villes sur les côtés" qu'il me dit. Ah, ok... Mais on ne les voit pas. Et quand même... ça fait bizarre. Et ça fait du bien, en même temps. Se croire au milieu de nulle part. Tout en sachant, en même temps, que les commodités sont tout près, qu'on n'est pas perdus dans un hostile environnement. ;)


Fin d'après-midi donc, on arrive. Il me dépose juste devant la station de bus, parfait. Il ne me demande rien, et, préoccupée que je suis par la suite du trajet, comment je vais charrier tout ce que j'ai?, j'oublie de payer. Oups! (Ceci dit, je lui ai envoyé un message quand j'ai réalisé, et il s'est avéré que ce n'était pas très important pour lui : "j'ai été content de t'aider". Encore plus que parfait, merci!). Steven & sa family n'habitent pas au coeur de Sydney, néanmoins c'est pas compliqué, suffit de suivre la ligne B. 7 arrêts, il vient me chercher. 10 min de voiture et... C'est parti pour une nouvelle aventure!


En fait... Pas tout à fait. Je rencontre d'abord Alexandra (sa femme), Alexender & Sophie (7 et 8 ans, ses deux enfants), découvre leur appartement. C'est un peu le bazar dans la maison, mais c'est parce qu'on part le lendemain, pour Dorrigo (la forêt, on y vient!). Et puis un café, une discussion sur le projet, la nature, l'environnement, comment on s'y est intéressés, les politiques d'agriculture... Tout ça tout ça, c'est passionnant! Et je suis accueillie comme si on se connaissait depuis looooongtemps, c'est rassurant.

Lendemain matin, le réveil sonne à 6h, mais avant qu'on soit prêts, la voiture (et surtout la remorque) chargée, faut bien encore 4 ou 5h. Pour le coup là, ça y'est : on part en expé! Je ne comprends pas trop, d'ailleurs : il me semblait que dans l'annonce, ils avaient indiqué que c'était à 1h... Autant dire la porte à côté, pourquoi donc autant de préparatifs, comme si on ne pouvait que très rarement y retourner? Mais parce que j'ai mal compris, pardi! C'est à 1h, oui... Mais pas 1h d'ici! 1H de Dorrigo, la "ville" la plus près, grosso modo. Aaaaaah, ok. Et donc du coup... On en a pour.. Toute la journée à rouler. 10H environ. OKKKK, je comprends mieux pourquoi y'avait autant de préparation!


Heureusement, les enfants sont (pas comme je l'étais - Maman Papa, pardon) d'un calme étonnant.

Minute minute, papillon. "Les enfants" comme ça, et c'est tout? Comme "les gens", comme s'ils n'étaient qu'un tout? Non c'est vrai, c'est vrai : ils méritent une meilleure présentation.

Donc, vite fait, Alexander, c'est "le super confiant", sûr de lui et ça se voit, si y'a quelque chose qui va pas il te le dit, et peu importe comment tu le prendras – je veux dire, pas méchant, mais direct, franc... à la manière d'un enfant. Parfait pour mon anglais, soit dit en passant. Le premier soir, je lui dis un truc, il me regarde avec un air bizarre, puis comprend et.. Me reprend : Ah, tu veux dire ça? Mais c'est pas comme ça. (Et il corrige mon accent). Tant de franchise, c'est parfois surprenant... Mais merci, j'apprends! Bref. Et Sophie, toute petite, toute fluette, semble le contraire de son frère : muette. Je lui pose une question, ou même son père, sa mère, son frère, parfois elle hoche la tête, mais pas un son. Parfois même, pas de réaction. Le premier soir, je trouvais ça bizarre. ... Et puis j'ai découvert le "secret" : elle est juste un peu réservée, mais, comme le renard que tout le monde connaît (j'espère, du moins, que vous le reconnaîtrez), j'ai appris à l'apprivoiser. Deux enfants bien différents... Mais tous les deux charmants. OUF! J'ai de la chance! Parce que moi, "les gosses"... J'ai pas la bosse, je crois!


BREEEEEF. Je disais : les enfants sont d'un calme étonnant – et, c'est tellement long qu'à la fin, on en a tous marre autant, de toute façon. De mon côté, heureusement, je me suis calmée depuis mon jeune âge, et j'reste calme pendant l'voyage. Enfin, de l'extérieur. Parce qu'à l'intérieur... C'est un vrai bouillon! Pour "après", j'ai plein d'options, et comme chaque fois qu'il faut faire un choix, la petite moulinette se met à tourner : ça, ou ça, ou ça, mais je sais pas, c'est quoi le meilleur? Aaaaaah! Je commence à paniquer. Et puis je me souviens : respirer. Et aussi, une citation que j'ai lu le matin : "Si une erreur est corrigée dès lors qu'elle est reconnue comme telle, alors la voie de l'erreur est la voie de la vérité". Et respirer, tenter d'imaginer chaque option, voire comment je me sentirais... Et prendre une décision, ouf!, soulagée. Comme quoi quand je m'écoute... Parfois je m'entends, Alléluia! Mais BREEEEEEEF (P***** Lola, tu peux pas te concentrer deux minutes sur la narration, sans faire de digressions?). Ok ok, je vais essayer. Donc, je disais : Près de minuit, ENFIN, nous voilà arrivés. À "La Maison Folle", comme ils l'appellent, au beau milieu de la forêt. Comme ils ne viennent pas souvent, les meubles sont couverts comme dans un musée, et ici c'est ça, et ci là, Alexandra commence à m'expliquer. Ça a l'air passionnant, mais franchement... Là, je suis claquée, j'voudrais juste aller me coucher ! Et, contrairement aux "rudiments" dont Steven m'avait parlé, je découvre que j'ai une vraie chambre (en mezzanine! Je suis ravie, excitée comme une gamine!), un vrai lit.. Et une grosse couette parce qu'il fait froid la nuit, merci!


Et voilà donc comment je me suis retrouvée au milieu de la forêt. Parce que j'ai eu envie de contribuer à ce projet, de les suivre dans cet endroit pommé-enchanté. L'idée, c'est : une maison construite sur le principe d'éco-habitat, un jardin en permaculture. L'auto-suffisance, donc, en énergie comme en nourriture. C'est pas abouti, loin de là, mais ça prend forme (et surtout j'étais prévenue, cette fois! Pas comme en Thaïlande & l'éco-village qui ne l'était pas tant que ça).

Pour le moment, la rivière fournit l'eau, récoltée dans un tank : filtrée pour boire, raccordée à la douche par toutes sortes de tuyaux. Pour les toilettes (intérieurs!) et l'évier (extérieur), c'est encore au seau. Pour l'électricité, c'est un générateur. (Je n'ai pas encore compris – ni demandé, d'ailleurs – comment ils veulent faire après : panneaux solaires?). Pour la nourriture... Y'a des poulets – donc des oeufs, aussi! - mais à part ça, tchi. Ils continuent de s'approvisionner au supermarché (en même temps, les arbres, ça met un certain temps à pousser et à donner des fruits...). Et puis ils ne sont pas là tout le temps (voire pas souvent, jusqu'à présent), c'est donc compliqué d'entretenir le potager. Mais ça va changer : depuis la rentrée, Alexandra donne les leçons.. à la maison! Donc plus de contraintes avec l'école, vacances ou pas si ils le veulent ils seront là. Et ils le veulent! Ils vont essayer de s'installer pour plusieurs mois, pour faire progresser plus vite "tout ça". À terme, en fait, ils veulent plus ou moins louer leur appartement sur Sydney, pour venir ici s'installer (au moins l'été). Parce que... "On ne sait jamais ce qui peut arriver", m'a dit Steven. Comprenez par là : si y'a une crise et que le monde part à vau-l'au, nous, on aura un endroit où s'mettre au chaud!


Ok, ok. Mais moi, j'travaille pas dans la construction, donc les installations (électriques, aquatiques – tout ça tout ça)... C'est pas pour moi. J'suis pas non plus bûcheron (ni taillée comme Hercule), j'vais avoir du mal à couper du bois. ... Mais que je ne m'inquiète pas : il y a à faire dans la maison! Ouvrir les nouveaux cartons, vider les tiroirs, réorganiser les placards... Et la vaisselle, et ramasser les feuilles, nourrir les poulets, faire les devoirs... Et vous savez quoi? J'aime ça. Je n'apprends, pour l'instant, ni la permaculture ni l'éco-habitat, mais j'aime ça. J'apprivoise Sophie, je médite au son de la pluie, je discute longuement avec Alexandra (elle est hongroise, elle a beaucoup voyagé, elle s'intéresse à la grèce antique, apprend l'allemand & le français)... Et ça me va. Et quand ça va pas, Alexandra est, pour moi aussi, comme une maman. Qui te caresse le front et te prend dans ses bras. Parce que t'as froid et que t'as fait n'importe quoi et que... Chut, chut, ça va, ne pleue pas, je suis là. Oui, j'apprends pas la permaculture ni l'éco-habitat, mais j'aime ça. J'aime contribuer à un projet, imaginer ce qu'il sera, après, comment la maison deviendra ; j'aime être là, entourée, comme une des leurs ça fait chaud au coeur ; j'aime faire mon café au réchaud et pas penser au boulot, me blottir sous la couette sans me prendre la tête... Oui j'aime tout ça. J'apprends pas la permaculture ni l'éco-habitat, mais j'apprends à être - et c'est tellement, déjà... La Nature. Et (re)trouver sa vraie nature... C'est ça l'Aventure, n'est-ce pas?



Lol'Âme des Bois

Photos :

x Le lever de soleil depuis la terrasse de Sydney

x Les "pies" de Fredo... Au crocodile, si si, vrai de vrai, selon le principe Better eat to be eaten! (Mieux de manger que d'être manger), ici c'est le p'tit qui mange le gros, l'homme qui bouffe le croco!

x La petite Sophie... & Ses jolies acrobaties.